Comprendre le Routing Information Protocol (RIP)

Router Information Protocol

Le Routing Information Protocol, plus connu sous son acronyme RIP, est un protocole de routage interne largement utilisé dans les réseaux d’entreprise depuis de nombreuses années. Bien que relativement simple comparé à d’autres protocoles plus récents, RIP reste un incontournable pour tout administrateur réseau souhaitant maîtriser les bases du routage dynamique. Dans cet article, nous vous proposons un tour d’horizon complet de RIP, de son fonctionnement à sa configuration en passant par ses évolutions au fil des versions. Vous découvrirez ses atouts mais aussi ses limites face aux enjeux des architectures réseaux modernes. Que vous soyez débutant ou professionnel expérimenté, suivez le guide pour tout savoir sur ce protocole !

En bref

Le protocole RIP est un protocole de routage interne utilisé pour échanger des informations de routage entre les routeurs d’un réseau d’entreprise. Basé sur l’algorithme à vecteur de distance, il permet de déterminer le meilleur chemin pour acheminer les données en fonction du nombre de sauts. Malgré certaines limitations, RIP reste pertinent sur des réseaux de petite taille grâce à sa simplicité de mise en œuvre.

Définition et fonctionnement du protocole RIP

Développé dans les années 1980, le protocole RIP fait partie de la famille des protocoles de routage à vecteur de distance. Son rôle est de permettre aux différents routeurs d’un réseau de s’échanger leurs tables de routage respectives, afin que chacun ait une vision de la topologie globale et puisse acheminer les paquets de données par le chemin optimal. Pour cela, RIP se base sur une métrique très simple : le nombre de sauts (ou « hops » en anglais), c’est-à-dire le nombre de routeurs traversés par les données pour atteindre leur destination.

Concrètement, chaque routeur exécutant RIP maintient une table de routage qui liste tous les réseaux connus et, pour chacun, le routeur voisin permettant de l’atteindre avec le moins de sauts possible. Toutes les 30 secondes par défaut, les routeurs s’envoient l’intégralité de leur table, permettant ainsi de propager les éventuels changements de topologie. Voici les principales caractéristiques de RIP :

  • Utilisation du port UDP 520 pour les échanges entre routeurs
  • Mises à jour de routage envoyées en broadcast toutes les 30 secondes
  • Métrique basée uniquement sur le nombre de sauts, avec un maximum de 15 sauts par défaut (au-delà le réseau est considéré comme inatteignable)
  • Algorithme de détection de boucles de routage pour éviter que les paquets ne tournent en rond indéfiniment
  • Mécanisme de « split horizon » et « route poisoning » pour accélérer la convergence en cas de changement de topologie

Malgré sa simplicité apparente, la conception de RIP intègre donc des mécanismes essentiels pour assurer un routage cohérent et efficace. Cependant, nous verrons plus loin que cette simplicité a aussi ses revers et que RIP montre rapidement ses limites sur des réseaux de grande envergure. Mais avant cela, intéressons-nous à l’historique de ce protocole et à ses différentes versions.

Les différentes versions de RIP : de RIPv1 à RIPng

Depuis sa création, RIP a connu plusieurs évolutions pour s’adapter aux besoins croissants des réseaux. On distingue principalement trois versions majeures :

  • RIPv1 : Définie en 1988 dans la RFC 1058, c’est la version originale du protocole. Elle présente cependant des limitations importantes, notamment l’absence de prise en charge du masque de sous-réseau variable (VLSM) et de mécanisme d’authentification.
  • RIPv2 : Standardisée en 1998 dans la RFC 2453, cette version apporte des améliorations significatives comme le support du VLSM, l’authentification des mises à jour par mot de passe, le passage en multicast au lieu du broadcast pour limiter la charge réseau.
  • RIPng (Next Generation) : Spécifiée en 1997 dans la RFC 2080, c’est l’adaptation de RIPv2 pour les réseaux IPv6. Elle conserve les mêmes principes de base en les adaptant au nouveau format d’adressage.

Pour mieux comprendre les apports de RIPv2 par rapport à son prédécesseur, voici un tableau comparatif résumant les principales différences :

FonctionnalitéRIPv1RIPv2
Prise en charge VLSMNonOui
AuthentificationNonOui (mot de passe)
Mises à jourBroadcastMulticast (224.0.0.9)
Masque de sous-réseau dans les mises à jourNonOui

Comme on peut le voir, RIPv2 corrige la plupart des lacunes de RIPv1 et s’avère donc largement préférable dans la majorité des situations. Quant à RIPng, il permet de continuer à utiliser RIP sur les réseaux IPv6, même si là encore d’autres protocoles comme OSPFv3 sont généralement privilégiés. Mais alors, quels sont les réels avantages de RIP par rapport à ses concurrents ? C’est ce que nous allons voir maintenant.

Avantages et limites de RIP

Le principal atout de RIP est sans conteste sa grande simplicité, que ce soit au niveau de son fonctionnement ou de sa configuration. Contrairement à OSPF par exemple qui nécessite une architecture complexe en zones, RIP peut être déployé de manière quasi-transparente : il suffit d’activer le protocole sur chaque interface du routeur en précisant le réseau à annoncer, et le tour est joué ! Nul besoin de planifier minutieusement son plan d’adressage ou de se soucier des types de zones et des aires.

Cette simplicité a aussi l’avantage de faciliter grandement l’administration et la maintenance du réseau. Ajouter ou supprimer un routeur ne demande que quelques commandes et le réseau convergera automatiquement en quelques minutes. De plus, la charge CPU et mémoire induite par RIP sur les routeurs est minime comparée à d’autres protocoles, ce qui peut s’avérer intéressant sur des équipements d’entrée de gamme.

Enfin, RIP est peu gourmand en bande passante car il n’envoie que des mises à jour partielles en cas de changement, et sinon uniquement sa table complète toutes les 30 secondes. Là encore, sur des liaisons WAN à faible débit, cela peut faire une différence notable par rapport à OSPF qui inonde le réseau de messages en permanence.

Malheureusement, les limitations de RIP viennent rapidement contrebalancer ces quelques avantages dès que le réseau atteint une certaine taille. La plus contraignante est sans doute le diamètre maximal du réseau limité à 15 sauts, au-delà duquel RIP considère les routes comme inaccessibles. Cela restreint de fait son utilisation aux petits réseaux locaux.

L’autre problème majeur de RIP est sa métrique simpliste basée uniquement sur le nombre de sauts, sans prise en compte de la bande passante, de la fiabilité ou de la latence des liens. Ainsi, RIP va toujours privilégier un chemin direct même s’il passe par une liaison saturée ou peu fiable, au lieu d’un chemin un peu plus long mais de bien meilleure qualité. Sur un réseau WAN avec des liens hétérogènes, cela peut vite devenir problématique.

Enfin, RIP souffre d’un temps de convergence relativement long du fait de son algorithme incrémental et de ses temporisateurs. Là où OSPF détecte et propage un changement de topologie en quelques secondes grâce à ses mises à jour en temps réel, RIP peut mettre plusieurs minutes voire dizaines de minutes selon la taille du réseau et les valeurs des timers. En cas de panne d’un lien ou d’un routeur, cela impacte directement la qualité de service.

Au final, on voit que RIP n’est réellement pertinent que sur des réseaux de petite taille, avec peu de routeurs et des liens homogènes. Dès que l’on dépasse une dizaine de routeurs ou que l’on interconnecte des sites distants, OSPF sera un choix plus judicieux à tous points de vue grâce à ses possibilités de hiérarchisation, ses métriques enrichies et sa convergence rapide. Mais dans tous les cas, il est important de maîtriser les bases de RIP qui restent un excellent cas d’école pour appréhender les notions de routage dynamique.

Configurer RIP sur un réseau

Maintenant que nous avons vu la théorie, place à la pratique ! Voyons concrètement comment mettre en œuvre RIP sur un réseau simple. Nous prendrons l’exemple d’une petite entreprise avec 3 routeurs interconnectant 3 réseaux locaux :

Pour configurer RIP sur chaque routeur, il faut utiliser le mode de configuration approprié. Voici les principales commandes IOS pour activer et paramétrer RIP :

  • Router(config)# router rip : active le processus RIP sur le routeur
  • Router(config-router)# version 2 : sélectionne RIPv2 (par défaut le routeur utilise RIPv1)
  • Router(config-router)# no auto-summary : désactive la récapitulation automatique des réseaux (utile uniquement si on utilise des masques de sous-réseau différents)
  • Router(config-router)# network @IP-RESEAU : annonce le réseau directement connecté spécifié dans la table de routage RIP ; à répéter pour chaque réseau
  • Router(config-router)# passive-interface @NOM-INTERFACE : empêche l’envoi des mises à jour RIP sur l’interface spécifiée (utile vers un réseau stub ou un hôte)

En appliquant cette configuration de base sur les 3 routeurs de notre exemple, nous obtenons :

Routeur 1 :

 R1(config)# router rip R1(config-router)# version 2 R1(config-router)# no auto-summary R1(config-router)# network 192.168.1.0 R1(config-router)# network 192.168.12.0 R1(config-router)# passive-interface GigabitEthernet0/0 

Routeur 2 :

 R2(config)# router rip R2(config-router)# version 2 R2(config-router)# no auto-summary R2(config-router)# network 192.168.2.0 R2(config-router)# network 192.168.12.0 R2(config-router)# network 192.168.23.0 R2(config-router)# passive-interface GigabitEthernet0/0 

Routeur 3 :

 R3(config)# router rip R3(config-router)# version 2 R3(config-router)# no auto-summary R3(config-router)# network 192.168.3.0 R3(config-router)# network 192.168.23.0 R3(config-router)# passive-interface GigabitEthernet0/0 

Une fois cette configuration appliquée partout, chaque routeur découvre les réseaux distants et met à jour sa table de routage en conséquence. On peut vérifier le bon fonctionnement avec les commandes show ip route et show ip protocols. Voilà, notre réseau fonctionne maintenant en routage dynamique RIP !

Bien sûr, dans un cas réel, il faudrait affiner cette configuration de base, par exemple en ajoutant de l’authentification sur les mises à jour, en réglant les timers, voire en filtrant certaines routes. Mais vous avez déjà les bases pour démarrer sereinement !

RIP face aux enjeux des réseaux modernes

Nous l’avons vu tout au long de cet article, RIP a marqué l’histoire des réseaux et reste incontournable pour débuter dans le routage dynamique. Cependant, il faut bien avouer qu’aujourd’hui son étoile a largement pâli et qu’il se fait de plus en plus rare dans les infrastructures d’entreprise.

D’une part, la taille et la complexité croissantes des réseaux, souvent répartis sur plusieurs sites géographiques interconnectés par des liens hétérogènes (MPLS, VPN..)

D’autre part, les exigences accrues en termes de qualité de service, de sécurité et de haute disponibilité ont rendu RIP inadapté dans bien des situations. Son temps de convergence lent, sa métrique simpliste et son incapacité à prendre en compte des critères comme la bande passante ou la fiabilité des liens en font un protocole peu adapté aux réseaux critiques nécessitant une grande réactivité.

De plus, l’absence de mécanismes d’authentification robustes dans RIPv1 et les failles de sécurité potentielles liées aux attaques de type « route poisoning » ont poussé les administrateurs réseaux à se tourner vers des solutions plus sûres comme OSPF ou EIGRP. Ces protocoles offrent en effet des fonctionnalités avancées de chiffrement et d’authentification des échanges de routage, limitant ainsi les risques d’intrusion et de compromission du plan de contrôle.

Pour finir, l’émergence de nouvelles architectures réseaux basées sur des overlays comme VXLAN ou EVPN, ainsi que la virtualisation croissante des fonctions réseaux (NFV), ont introduit des contraintes supplémentaires en termes d’extensibilité et d’intégration que des protocoles évolués comme BGP ou IS-IS sont plus à même de gérer. La scalabilité limitée de RIP et son manque de support des adresses IPv6 en font un candidat peu probable pour les déploiements SDN de grande ampleur.

Pour autant, il serait exagéré d’enterrer définitivement RIP. Si son utilisation se raréfie dans les grands réseaux d’entreprise, il conserve des atouts pour les petites structures cherchant une solution de routage simple à mettre en œuvre et ne nécessitant pas de fonctionnalités avancées. On le retrouve ainsi fréquemment dans des réseaux industriels, des infrastructures isolées ou des architectures de laboratoire.

En tant qu’outil pédagogique, RIP reste une excellente porte d’entrée pour appréhender les concepts du routage dynamique. Sa relative simplicité permet d’illustrer facilement les mécanismes de base d’un protocole à vecteur de distance, ce qui en fait un incontournable des formations réseaux. Avant de se lancer dans le déploiement d’OSPF ou d’EIGRP, il est souvent pertinent de s’essayer d’abord à RIP pour en comprendre le fonctionnement.

En définitive, s’il est clair que RIP n’est plus le protocole le plus adapté aux enjeux des réseaux modernes, il garde une place à part dans le paysage des protocoles de routage. Loin d’être obsolète, il demeure un outil précieux dans certains contextes spécifiques et conserve tout son intérêt en tant que base d’apprentissage. À l’heure des réseaux hyper-connectés, virtualisés et automatisés, ne négligeons pas l’apport des protocoles historiques sur lesquels s’est bâti l’Internet d’aujourd’hui !

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